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mercredi 27 juin 2018

Max attaque


-"Allo!"
-"Wouhai !"
-"C'est le Did, je suis sur Paris, arrivé ce matin avec Jean Pat en camion de Raon"
Je venais en effet de passer la nuit dans le camion avec J Patrick; en fait je connaissais le patron de la boite de transport, le gros Muller, je l'avais croisé sur le marché en zonant le samedi matin; pour une fois, y flânait de par chez-nous avec sa femme, çà devait le changer des grands boulevards ou des putes la nuit sur le périf à Pan am.Nous nous affrontâmes un bref instant gentiment  du regard en nous serrant fortement la main.


Patrick Muller possédait par héritage une entreprise d'une trentaine de camions  qui faisaient régulièrement des tours sur la grande cité parisienne mais pas seulement y naviguaient aussi dans le grand nord français.

Ce dimanche soir là attendant en fumant nerveusement une clope en vue du premier contact avec le chauffeur avant de prendre la route; c'était important le premier contact comme l'auto-stop, le chauffeur devait voir tout de suite qu'il avait pas affaire à un ingrat profiteur mais à un mec plutôt sympa qui lui ferait gentiment la conversation en route pour l’empêcher de dormir.
Vers 21 heures il arriva et qu’elle ne fut pas ma surprise, j'en eu presque le souffle coupé et lui aussi d'ailleurs-Le chauffeur n'était autre que J. Pat Vernier, on s'étaient pas vu depuis des années mais toutes les virées et soirées mémorables de jeunesse de notre bande d'anciens jeunes trônaient encore dans nos deux mémoires respectives On s'est embrassé, le gros Mumu nous avait bien roulé dans la farine, on était vachement contents de se revoir et à l'dée de faire un bout de route ensemble , on savourait,tellement de choses à se raconter.
Après quelques heures de route, la nuit fut définitivement noire, Jean Pat alluma une petite lumière rose qui vint s'ajouter à toutes celles du tableau de bord, le camion filait sur le grand ruban noir de la N4 vers la capitale. Profitant d'un temps mort je lui filai une cassette de Billy Idle, çà tapait bien, la sérénité régnait dans l'habitacle et je nous roulai un p'tit stick de Jaja du lot. JP apprécia mon geste, on en revenait pas de se retrouver là tous les deux filant dans la nuit. Je fus soudain tiré de ma torpeur par un grand coup d'avertisseur, JP me regarda de côté sérieux attentif à la conduite de son gros bahut: Il me dit voyant que je ne comprenais pas la raison de ce gros coup de klaxon.
-"C'est pour mon frère, on est à Toul il est derrière les barreaux et à chaque fois que je passe ici, je klaxonne, y sait que c'est moi."

 Vers deux heures du matin on scotcha le camion sur le bord de la route pour faire un petit saut dans le monde du sommeil. Le réveil sonna à 4h30, le moteur gronda , c'était parti pour un tour autour de la grande cité, une vingtaine de livraisons; on allaient en faire deux petites et y me larguerait au plus prés de la gare de Lyon . On se sépara vite fait sur le bord d'une avenue. J'étais à Paris, le temps était beau , je pouvais flâner tranquillement vers la prochaine station de métro, anonyme, anonyme,jeté dans les transports du petit matin parisien, je commençai à naviguer comme les autres.

Après un blanc…Max m'expliqua la route à suivre pour le rejoindre, il habitait chez un ami dans l'est de Paris-"Tu prends  "St Lazare" et après  à "la fourche", te plantes pas, tu suis Annière Gennevilliers…"
Arrivé sur place, je suivis ses instructions et je n'eus aucun mal à trouver son logis situé dans un petit immeuble.
Après  les embrassades d'usage comme quand les gens se sont pas vu depuis très longtemps et qui sont tellement contents de se revoir, on s'installa dans la petite cuisine formica attenante au petit salon à côté de la petite chambre; on pris un petit déj sans façon avec se qui traînaient par las et bien sûr on causa. Cela faisait plus de deux ans qu'il vivait ici avec Jacques qui l'avait sorti de la mouise quand y clochardisait à la gare du nord. Jacques avait été magnifique, il l'avait littéralement sauvé, grâce à lui de nouveau regrimper les barreaux de l'échelle de la société des hommes
 ………<< Ah! Jacques, tu verras, c'est quelqu'un
Ancien agrégé de maths qui avait préfèré lâcher l'enseignement pour travailler dans une usine comme tourneur mécanique et  s'engager aux côté des ouvriers dans le combat . Il était à la SNECMA, une boite que tous les parisiens connaissent bien; mais le point le plus important c'est qu'il passait les deux tiers de son temps non pas sur une machine mais à naviguer entre les différents postes en tant que délégué du personnel: 


-<>
 Max me demanda a brûle pourpoint si j'avais un peu de tunes, je lui dit que oui.
-<< Alors on va descendre en ville achetez un peu de fume.
Nous voilà repartis dans les transports parisiens qui nous brinquebalent gentiment vers d'autres horizons; les stations défilent :Belleville, Barbès terminus, on s’éjecte dans la rue qui nous saute à la gueule  d'un coup comme un chat arrosé. Max en grand connaisseur des lieux a tôt fait d’accoster un mec qui fait la pute en traînant ses baskets crados le long du trottoir, et qui lui sort de dessous un pare choc de bagnole un sachet plastique avec des petites  barrettes brillantes de toshi  à l'intérieur. Il revient vers moi tout sourire.

De nouveau dans le grand tunnel, on file vers le centre. la journée passe et l'on se retrouve passablement défaits à la gare du nord ou Max tient absolument à me faire voir les lieux ou il sévissait pendant sa période de clochardisation.
On s'assied dans un coin tranquille comme au cinéma et il me dépeins au fur et à mesure toute la faune du lieu et c'est sûr qu'avec les commentaires on voit pas les choses pareil, ensuite après quelques bières, il me fait la démonstration du passage des portes guillotines profitant hilare d'un qui sort pour se faufiler dans l'autre sens comme un toréador, puis il ressort lentement dans l'autre sens grand seigneur.
Franchement çà me fait marer mais j'ai pas envie d'essayer. Alors c'était là dans cet escalier qui menait les gens vers la sortie que le frère Jacques, après trois mois de zone, lui avait tendu la main.
Le soir tombait, Max ne voulait pas rentrer, on allait s'amuser qui disait, faire comme lui y faisait avant, j'étais pas trop chaud pour ce genre de dèlire mais il me traîna vers une épicerie en sous-sol ou me dit-il il venait se ravitailler la nuit.
 A force de zoner le temps avait passé et le dernier métro aussi, plus question de rentrer à Gennevilliers: Je me souviens d'une porte en fer jaune et d'un escalier en béton  en colimaçon derrière cette porte ou la lumière restait allumée - On s'est installé là fumant et fumant encore nos dernières cigarettes en finissant le pack de bières et on s'est endormis vaguement püliés dans les marches de l'escalier.
Le matin finit par arriver tout de même et c'est un peu défraîchis que nous nous expulsâmes dans la rue voisine au petit matin parisien. Après un bon café et un sandwich Max me fit visiter les derniers petits troquets des Halles, autour du centre Pompidou (je crois); ces derniers petits bistrots encore authentiques ou l'on pouvait encore se jeter un petit canon de rouge pour pas cher.
 Ensuite on décida  de repartir vers Gennevilliers. Vers 18 heures Jacques rentra de son travail, lorsqu'il ouvrit sa porte, il fut surpris de me voir et je sentis comme un froid entre nous- Max se leva et lui tint ce langage.


Jacques ne dit rien mais fit bien comprendre à max que ses copains il en avait jusque là.

  Enfin bref Jacques tournait un peu comme une bête dans le petit appartement et moi je restais assis dans mon coin sans faire de vague .Max ne tarissait pas d'éloges à propos de Jacques.
  -Et Jacques était un artiste, la preuve y avait qu'à regarder les clavecins, et Jacques était un érudit, y pouvait presque dire tous les titres des opéras et des morceaux  sur France Musique dès que l'orchestre se mettait en branle. Et puis Jacques était engagé et la SNECMA tu vois c'est pas rien et Jacques militait et tout et tout..>>
 Je n'étais pas vraiment à mon aise mais bon quand on squatte y faut savoir faire des concessions: Jacques dit abruptement que Max aussi avait travaillé à la SNECMA pendant presque deux ans après avoir obtenu son diplôme de tourneur mécanique, mais bien sûr max s'était fait virer à cause de son tempérament de poète et surtout pour ses nombreux retards…l'ambiance n'était pas à ce qu'on pourrait appeler "au beau fixe" .
On dina rapidement, Max adorait faire la cuisine puis on alla se coucher peu de temps après car Jacques devait se lever de bonne heure le lendemain matin. Dans la chambrette, il n'y avait qu'un seul lit à étage, j'eus droit à la couchette du bas et Max et Jacques grimpèrent sur celle du haut; cela me sembla tout d'abord un peu suspect mais bon je commençais à être vraiment crevé et j'allais pas faire le difficile. Pourtant quand la nuit fut vraiment noire, j'entendis des chuchotements et divers bruits de sucions qui ne pouvaient pas me laisser indiffèrent: le matin arriva enfin, le dèj fut vite expédié et Jacques en quittant l'appart nous enjoignit de le faire aussi. nous nous séparâmes dans le petit matin parisien;
 Max partit pour Saleilles et voir sa sœur Myriam et moi je ne savais pas trop, je devais déposer quelques CVS dans des chaînes hôtelières et surtout j'avais rendez-vous avec  mon oncle depuis  dix ans revenu d'Afrique et qui s'était de nouveau installé à Paris pour son travail chez Air France si tout se passa bien j'aurais peut être un job d'ici peu sinon direction Andorre chez le Nouch.