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jeudi 8 septembre 2016

Maurice B. Ulysse87 lui raconte




Maurice, un peu éberlué par cette soudaine rencontre écoute Ulysse 87 qui lui raconte ses voyages.
D'abord toutes les années d'errance dans la profondeur des régions françaises glanant dans le début du grand revival "des eighties" du travail au gré des saisons, de la mer à la montagne.
Maurice boit les paroles d'Ulysse comme un ivrogne, cela lui donne l'impression de revivre un peu, de revenir au monde; il fumerait bien une cigarette, mais dans ce lieu pareil à une planète Mars, du moins ce qu'il en imagine.Ici, c'est le monde qui fume et les hommes qui brûlent.

Ulysse87 parle et parle encore.De la Corse traversée à pied quand il était ado, de Calvi sans la Marina, du Roi de La bouillabaisse du premier job en bas des Pyrénées , et puis encore du tour de l'England quand il eut enfin 18 ans, de l'Italie du nord, toujours sur la route, toujours de nouvelles rencontres- du Garlaban de la sainte Baume de Marseille, le cours Belsunce,  cinq heure du soir en remontant la Canebière.

Voilà plus d'une bonne heure qu'il parle qu' il narre toujours plus - De la Belgique Romaine, des Luxs, des virées en Allemagne ensuite viennent le début des années Londoniennes - les pubs les théâtres d'Islington, les boulots dans les grands restaurants, le West-End, la city, Brixton,  les pythons de Corinne à Vauxhall, Portobello Road, Angel station, la débrouille, les squats, l'ouverture sur le monde- La vie au jour le jour, les potes,  la jeunesse qui brûle par les deux bouts - Une école d'Art, une nouvelle petite amie, une israélienne.

Maurice s'est assit par terre sur une pierre au milieu du chemin, ce type le scie littéralement, c'est affligeant, il a vraiment trop envie de fumer, il voudrait cracher par terre mais sa bouche en feu est trop desséchée. Cet Ulysse le saoule avec ses récits tout décousus, il n'a même plus la force de bouger la  tête enfoncée dans ses épaules.

Ulysse lui tape gaillardement sur l'épaule en lui tendant une bouteille d'alcool que Maurice assoiffé s'empresse de porter à ses lèvres. Le liquide brûlant le traverse de part en part, il voit dans un éclair la montagne qui se découpe en quartiers rougeoyants. Alors Ulysse reprend son récit.
J’emmène ma copine au fond des bois Vosgiens à Noël, elle qui ne parle pas un mot de français découvre la France profonde et les beaufs, ma mère dans son deux pièces moyenâgeux. On s'enfuit en stop la nuit, sous la neige tombante, vers Paris. De la famille à Nanterre, une cousine et puis le nouvel an sur le Mont Valérien chez les parents de la cousine, des rupins: Quelle horreur !!!

"Back to London"- Cette fois-ci, dit-il, il fallait prendre l'avion à Gatwick pour passer de l'autre côté de la méditerranée, atterrir a Ben Gourion - les femmes psys au débarquement qui te scrutent sous toutes les coutures. Heureusement, j'ai mon sauf conduit. Dans deux jours il y a un grand mariage de deux cents personnes à Tel Aviv - Jaffa tous les mariées se font photographier sous les orangers.

Retour au Carmel à Haïfa, la descente d'enfer en bus vers le front de mer en face de la grosse raffinerie qui pue -
Ma girl friend est revenue au pays avant le décès proche de sa mère grand  anglaise qui a connu Einstein à Londres à 17 ans. Grand papa allemand est un ancien avocat du barreau de Tel Aviv. Ils ont maintenant plus de 90 ans. 
Papa anglais est un ancien gradé de l'armée qui bosse pour le nucléaire. Maman une juive marocaine, a un petit boulot dans un super market à la caisse. C'est le mois d'avril mais il fait déjà très très chaud. On va filer naviguer avec papa à Acro sur un petit voilier au doux nom d'illusion.
Je suis comme dans un rêve, je flotte - Jérusalem, le mur, la vieille ville, les provocations, ma rencontre avec mon premier russe juste débarqué de Moscou (Un fan du groupe Gong et de David Allen).

Alors dit Ulysse, on m'envoie au bord de la mer morte ou je ferai un petit job dans une field school à Ein Gedi, une oasis cosmopolite. L'endroit est génial, il y a des gens du monde entier qui sont là pour aider et passer aussi un peu de bon temps dans ce spot formidable, le plus bas du monde (580 mètres en dessous de niveau de la mer): On se laisse flotter au coucher du soleil sur la surface hyper salée de la mer morte nus comme des vers enrobés de mub. Je fais une brève escapade à Jéricho tout prés - un camp de réfugiés derrière les barbelés et les mitrailleuses.
Et enfin, cerise sur le gâteau, départ vers Eilat/Taba - des jours et des jours sur la plage au bord de la mer rouge entre Jordanie et Égypte, chaque matin réveillé sur la plage par une auto radio au son de "Still loving you" des Scorpions, le tube de cet été là en 1987.

Bersheba université chez la cousine étudiante au milieu du Sinaï - le Jourdain: Je ne marcherai pas sur l'eau du lac de Tibériade, c'est le clash avec beau-papa et la copine.
Le trajet du retour en vrac à Londres chez un vieux pote sur le canapé -  je suis à la rue. Je mets mes deux cartons dans le train et m'en retourne au fond de mes bois Vosgiens - c'est le spleen.
Ma chère mère qui trime encore à l'usine de textile du coin voudrait me voir repartir très vite.
Je ne comprends pas, avec ma copine on devait faire le grand voyage vers l'île du Cap Nord, un plan pour se faire un peu de fric et boire le bon air du grand nord au Midnight Sun et voilà que je me retrouve tout seul dans mon bled de nases.

- Et bien Maurice, tient bois un coup, tu vois ! alors j'décide que j'irai quand même au cap nord, en stop, ouais, y'a pas de raison c'est possible, j'y arriverai. Eh Maurice ! bois pas tout t'es bourré ou quoi - faut que je te laisse Maurice, j'ai à faire, tchao Momo, à la revoyure, j'te souhaite bon courage pour ta route. Ulysse s'en va abandonnant Maurice qui reste là bouche bée stupéfait.

phildid