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Charles Dugalois




Le secrétaire général était nerveux, un mauvais tic animait le coin droit de sa bouche qui faisait comme un déclic d'appareil photo. En compagnie du colonel Jarvis, il fixait Charles et semblait attendre de sa part une réponse qui ne venait pas.
Les problèmes avaient commencé ainsi . D'abord un événement banal qui s'était transformé en scénario catastrophe, une réaction en chaine et l’événement (appelons le ainsi) avait pris des proportions invraisemblables.

Dans un comté du pays que nous garderons secret pour l'instant, pour des raisons évidentes de sécurité - Une vache s'était échappée d'un enclos. Elle avait tout d'abord été signalée au bureau du shérif de manière fortuite. On l'avait vue à plusieurs reprises dans des villages qu'elle traversait . Les gens tout d'abord un peu intrigués, s'approchaient de l'animal qui  adoptait alors un comportement bizarre, retroussant les naseaux, il sifflait en lâchant  un filet de bave dans un chapelet de bulles - Puis il se mettait à gronder, un grondement lent qui s'amplifiait un peu à la manière des émeus d'Amérique du Sud mais en beaucoup plus bruyant.
Aux dires des différents témoins, l'animal tremblait, il vibrait dans une sorte de transe et d'un coup mais alors là - C'est le colonel Jarvis qui parlait.

- « L’animal foutait le camp en un temps record et quelques secondes plus tard, on ne le voyait plus ».
Ce petit manège avait duré quelques semaines , la bête vagabonde était vue ici ou là et soudain disparaissait brutalement. Certains l'avaient même aperçue un temps qui broutait tranquillement au milieu d'un rond point dans la petite ville de Lexingtown. On avait fini par l'oublier quand un beau jour l'adjoint du shérif, Franck Carpenter fut appelé par les voisins d'une petite exploitation d'élevage de bétail. La famille Sanders avait constaté, une nuit, un énorme raffut dans un pré à proximité de leur maison. Ils étaient sortis armés d'une grosse lampe torche et avaient constaté le décès d'une bonne quinzaine d'animaux bovins. Aussitôt ils avaient appelé le bureau du shérif du conté et Franck s'était immédiatement rendu sur place. La scène était impressionnante. Franck avait tout de suite décidé d'alerter les services sanitaires d'urgence. Une petite cohorte de gens habillés en blanc, munis de gants et de masques s'affairaient maintenant autour des animaux morts. Les hommes du shérif, eux mettaient en place un périmètre de sécurité, les mesures prises semblaient disproportionnées par rapport à l'événement  - Les témoins, le personnel ainsi que les propriétaires de la ferme furent évacués en vue d'un confinement. Les interrogatoires de police qui eurent lieu les jours suivants permirent de découvrir que le fameux animal suspect qu'on avait vu un peu partout provenait de cet élevage. Le secrétaire général fut alors alerté, personne ne parlait de menace réelle pourtant tous les acteurs étaient tendus - Le secrétaire lui-même avait du mal à dissimuler son profond malaise quand les spécialistes qui s'inquiétaient désormais de l'errance de cet animal  faisant planer on ne sait quelle menace biologique. Il pestait régulièrement devant le chef de la police tout en évitant de croiser les regards des nombreux journalistes qui commençaient à harceler son bureau. Il se bornait pour le moment à répéter.
- « Pas de déclaration officielle pour le moment, nous avons pris toutes les dispositions nécessaires en pareil cas - C'est le principe de précaution qui s'applique. Inutile de s'alarmer ou d'épouvanter la population, les analyses sont en cours, nous maîtrisons la situation, dés que nous allons y voir un peu plus clair je ne manquerai pas de vous faire une déclaration, en attendant je vous prie de nous laisser travailler sereinement, à bientôt ».

Les premières analyses confirmèrent qu'on avait affaire à un mal peu commun et jusque là encore inconnu à ce jour. Le périmètre de sureté fut agrandi et renforcé. Des policiers se postèrent aux différents carrefours pour contrôler les entrées et les sorties. Un groupe des forces spéciales se mit en liaison avec le colonel Jarvis et ses hommes pour surveiller et boucler le périmètre. Un hélicoptère surveilla la zone. Le secrétaire appela le ministre. On déclencha le plan rouge- Une déclaration minimale fut faite à la presse, les chefs de rédaction furent contactés par le bureau du ministre de l'intérieur.  La consigne répétée en boucles
.-
« Pas de vagues ».
Les animaux avaient prestement et discrètement été enlevés puis incinérés, toute la nuit jusqu'au matin plusieurs petits avions aspergèrent la zone d'agents désinfectants. Des inspecteurs firent le déplacement de la ville voisine ainsi que quatre agents de Darrington.
Le balayage systématique des environs par les enquêteurs permit presque aussitôt de croiser plusieurs informations importantes. La dernière en date était la découverte du cas de John Jackson, le père d'une petite famille de quatre personnes qui habitait à quelques kilomètres du sinistre.  Monsieur Jackson était actuellement hospitalisé à l'hôpital local de Lexingtown.
Le rapport déclarait:

Alors qu'il effectuait quelques petits travaux en haut d'une échelle, sur un des murs de sa maison. L'animal avait surgit. le fils racontait alors qu'après avoir surgit de manière impromptue, comme de nulle part, la bête s'était immobilisée à distance d'une bonne dizaine de mètres, les naseaux retroussés, elle avait sifflé, comme on souffle dans une trompette...
C'était les mots du gamin, ensuite il avait entendu le fameux grondement sourd et d'un coup la bête avait chargé l'échelle du père, celui-ci avait été projeté dans les airs - heureusement retombé dans les hautes herbes sans trop de bobos.
L'animal s'était alors approché en dandinant près du père, il bavait littéralement sur le visage de John qui le regardait sans bouger, hypnotisé. Le fils a crié et l'animal s'est enfuit vers le bois voisin. Aussitôt la famille a fait appel à l'oncle Harry, le garde forestier, ils ont fait une mini battue dans le bois, ils ont bien repéré quelques traces mais rien d'autre l'animal s'était encore une fois bel et bien évaporé. Les services sanitaires s'étaient rendus à l'hôpital en compagnie de plusieurs policiers, John avait été évacué à son tour vers la zone de contingence. Comme dit précédemment, il avait pas mal de contusions sans gravité, toutefois un fait non négligeable pour la famille et les enquêteurs - John avait complétement perdu la mémoire, il ne se souvenait absolument de rien de ce qui s'était passé.

Voilà ou on en était de l’enquête, Charles savait tout cela, en tant que scientifique il ne doutait pas du caractère intrigant de cette affaire - Dans son nouveau laboratoire de crise monté en toute hâte chez un collègue vétérinaire, il avait commencé les études et les analyses sur un des corps de bovin retrouvé à la ferme. Une autopsie ainsi qu'une découpe des tissus musculaires et nerveux étaient en cours. le cerveau de la bête avait été isolé, des échantillons avaient déjà mis à jour sous l'œil implacable des gros microscopes électroniques, des phénomènes qu'il n`hésitait pas à qualifier d'anormaux.
Le secrétaire devenait de plus en plus nerveux, et il gueulait dans le micro qui servait de relais entre lui et les équipes de biologistes par delà la grande vitre blindée.

Charles ne pouvait rien dire de plus, les analyses étaient en cours, il avait déjà communiqué avec plusieurs collègues, des biologistes, des spécialistes en virologie et infections en tout genre venaient d'arriver sur place. Pour le moment, on en était là, on se doutait qu'on touchait à quelque chose d'énorme - Toutes les mesures d'isolement et de protection sanitaire avaient été mises en place - L’enquête continuait pour retrouver l'animal fugueur, le colonel Jarvis salua Charles qui derrière la vitre dans le sas de sécurité revêtait une combinaison P4, son visage derrière le respirateur témoignait d'une grande concentration. Le secrétaire et le colonel quittèrent les lieux dans la berline qui venait de se garer devant le cabinet du vétérinaire.

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